Interview : Fally Ipupa, l’artiste congolais qui domine la scène musicale africaine, ambassadeur de l’Unicef
Avec sa tournée triomphante Formule World Tour, l’« Aigle » de Kinshasa survole sans contexte la scène musicale africaine. Ambassadeur de l’Unicef, l’artiste a souhaité s’engager contre la malnutrition qui touche des millions d’enfants en RDC.
De son vrai nom Fally N’simba Ipupa, Fally Ipupa est sans conteste l’une des plus grandes stars de la musique africaine contemporaine. Après sept années au sein du groupe Quartier Latin et dix-sept ans de carrière solo, Fally Ipupa souhaite mettre sa notoriété au service des causes qui lui tiennent à cœur. Nommé ambassadeur de l’Unicef en 2021, il s’engage contre la malnutrition qui touche des millions d’enfants en RDC. Ambassadeur de bonne volonté de la Mission des Nations unies au Congo (Monusco) depuis 2018 dans la lutte contre le recrutement d’enfants par les groupes armés, avec sa structure Fally Ipupa Fondation, l’artiste a visité des orphelins au Mali, en Côte d’Ivoire, en Zambie et offert une ambulance médicalisée à l’hôpital général de Goma. Véritable légende vivante de la scène musicale africaine, sa musique et ses chansons en lingala transcendent les frontières et rassemblent des fans du monde entier, unifiant les gens grâce à des mélodies et des rythmes entraînants, qui font de lui un exemple inspirant de détermination, de talent et d’engagement envers sa culture et son peuple. Danseur exceptionnel, ses performances scéniques sont animées par des mouvements captivants qui ajoutent une dimension visuelle à sa musique. Son sens du style mélange des influences africaines et occidentales, et font de lui le meilleur ambassadeur de la sapologie congolaise.
Vous êtes une star internationale et vos tournées attirent des foules enthousiastes, vous mesurez le chemin parcouru depuis Quartier Latin ?
Si je le mesure ? Oui, car j’ai beaucoup travaillé pour en arriver là.
Souvent, les gens ne voient que le résultat, les concerts, les feat, mais ce sont des milliers d’heures de travail pour toujours se perfectionner et se réinventer. C’est aussi un travail d’équipe. Je suis la partie visible d’un travail incroyable fait par mes collaborateurs.
Quel est l’artiste qui vous a le plus influencé ?
Il y en a énormément. Déjà à Kinshasa quand j’ai commencé, de nombreux artistes m’inspiraient. Mais je dirais que Marvin Gaye et Michael Jackson restent pour moi comme pour beaucoup des figures incontournables.
Et quelle est la collaboration dont vous rêvez ?
Une collaboration que j’adorerais faire, ce serait avec des artistes comme Jay-Z ou Rihanna !
Votre look tout en étant dans la tradition de la sapologie congolaise est aussi d’une certaine manière avant-gardiste pour l’Afrique, vous portez du vernis à ongles, des sautoirs et des broches Chanel, est-ce aussi une manière de plaire aux femmes en adoptant leurs codes vestimentaires ?
Je suis avant-gardiste. C’est ça la mode, certains prennent des risques, d’autres non. Certains donnent le tempo, d’autres suivent. En fait c’est comme pour ma musique, je crois qu’en réalité, la seule manière d’innover c’est de casser les codes. Composer c’est mélanger. C’est ce que je fais quand je chante, quand je danse et quand je m’habille.
Justement les femmes vous en parlez dans vos chansons parfois en implorant leur amour, ce qui est inhabituel dans le rap par exemple.
Non en fait, les rappeurs d’avant avaient un style très macho mais j’observe que beaucoup vont sur des textes plus sensibles. Moi je chante l’amour. Et l’amour ne se chante pas en étant macho.
Vous chantez en lingala, vous êtes aussi un fervent défenseur de votre culture ?
Je suis d’abord un lingalophone avant d’être anglophone ou francophone. Même si je m’exporte, le lingala c’est aussi une manière de rester authentique. En réalité, pour moi le lingala reste la langue de l’amour.
Vous êtes ambassadeur de l’Unicef, comment arrivez-vous à concilier vos actions humanitaires et vos tournées à travers le monde ?
J’essaie toujours de trouver du temps pour de bonnes causes. Aujourd’hui je suis ambassadeur de l’Unicef pour les enfants et la malnutrition. Avec ma fondation, qui a dix ans, on opère partout en Afrique, via des dons d’ambulances médicalisées à l’hôpital général de Goma (Kinshasa). Et on a acheté des terrains pour des orphelinats à Kinshasa.
Vous avez créé votre propre maternité. Pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
Vous savez, en Afrique quand vous allez pour accoucher et que vous ne payez pas votre facture, vous restez prisonnière. Et donc nous on libère chaque année des dizaines de mamans.
Un de nos grands projets pour 2024 est la construction d’une maternité à Bandal.
Vous avez des filles. Quelles valeurs souhaitez-vous leur transmettre ?
L’amour, le respect et l’honnêteté. Qu’elles soient battantes et indépendantes.
Vous êtes aussi impliqué dans la défense des enfants des rues qui sont considérés comme des sorciers. Pouvez-vous nous en dire un mot ?
Cette pratique est utilisée comme prétexte pour exclure des gens. Je vous l’ai dit, je chante l’amour. C’est contre mes valeurs.
Vous aimez la mode, est-ce que vous pensez à lancer votre marque ?
J’ai déjà ma marque, Attitude. On travaille et ça va arriver très fort l’année prochaine !