« Je suis Jessica White, mannequin, entrepreneure, activiste, philanthrope et, plus important encore, noire et fière de l’être. » Tout est dit. Des propos qui témoignent de l’assurance, de la détermination et du courage de cette magnifique jeune femme de 35 ans qui a déjà tant enduré : un viol à 14 ans, une overdose de coke à 20 ans… Plus parlant encore est son parcours, depuis ses débuts de top model dans le prestigieux Vogue jusqu’à ses récentes parutions au cinéma (The Perfect Match, 2016) ou à la télévision. Victoria’s Secret, Sonia Rykiel, Oscar de la Renta, Ralph Lauren, Marc Jacobs – pour ne citer que ceux-là – l’ont fait défiler. Et de grandes griffes comme Gap, Gemey Maybelline, Chloé ou Tommy Hilfiger en ont fait leur égérie. Jessica White, semble-t-il, a tout vu, tout vécu, tout accompli. Et pourtant, elle continue de rêver. Confidences d’une amoureuse de la vie.

Dès lors qu’on comprend ce que l’on peut apporter aux autres, on n’en est que plus efficace

Vous n’avez jamais fait grand mystère de votre vie.Le public sait tout de vous (ou presque)… N’est-ce pas difficile de se mettre ainsi à nu ?

En fait, pas du tout ! C’est quelque chose que j’assume parfaitement car c’est ce parcours qui a fait de moi la femme forte et positive que je suis devenue. Tout un chacun, quels que soient son âge, son genre ou sa couleur de peau traverse des épreuves. En m’ouvrant ainsi sur ma propre expérience, sur ce que j’ai enduré et la façon
dont je l’ai surmonté, j’ai sans doute aidé quelques personnes à affronter leurs difficultés. Et peu importe ce par quoi vous passez, vos problèmes ne définissent pas qui vous êtes.

À ce propos justement, depuis l’émergence de MeToo, beaucoup de femmes partagent leur vécu du harcèlement ou de l’abus sexuel qu’elles ont subi. Quel regard portez-vous sur ce mouvement ?

Si cela peut permettre à des femmes de briser le silence et de s’exprimer sur des sujets qu’elles n’osaient ou ne pouvaient pas aborder avant, alors j’y suis totalement favorable. Il y a bien sûr des risques de dérives, que l’on s’éloigne des intentions initiales de celles qui ont lancé ce mouvement mais de manière générale tout cela va dans le bon sens. Ceux qui agissent mal sont enfin mis face à leurs responsabilités et les femmes n’ont plus peur maintenant. Elles ont conscience de leur valeur.

Votre réussite est très impressionnante quand on considère tout ce que vous avez traversé. Avez-vous conscience d’être un exemple pour tant d’autres ?

Oh que oui ! Et c’est pour cela que je suis la personne idéale pour encourager les femmes et pour les défendre. Je sais parfaitement que j’ai une certaine légitimité et je n’hésite pas à m’en servir. Dès lors qu’on comprend ce que l’on peut apporter aux autres, on n’en est que plus efficace.

C’est pour cela que vous avez créé la fondation Angel Wings en 2010, en soutien aux femmes ou aux filles victimes de violences domestiques et d’abus sexuels. Parlez-nous des actions que vous menez…

Au fil des ans, nous avons réuni des fonds et mené une campagne de sensibilisation partout où cela était possible : à travers les États-Unis, en Afrique et dans certaines parties de l’Europe. Nous avons porté le message dans des écoles, nous sommes intervenus à des tables rondes et des groupes de discussion et nous avons participé à des événements sportifs ou musicaux. Je suis contente de ce qui a été accompli jusqu’ici mais il reste encore tant à faire. Nous réfléchissons maintenant à une manière d’atteindre une audience encore plus large. Au printemps dernier, nous nous sommes concentrés sur l’Afrique.

Votre carrière de mannequin a débuté quand vous aviez 13 ans. À 35 ans aujourd’hui, vous vous épanouissez aussi en tant qu’actrice, réalisatrice, interprète et productrice. Quelles sont les prochaines étapes ?

Je veux poursuivre sur cette voie et, pourquoi pas, repousser encore plus les limites. Je veux plus de rôles, plus de succès commercial, plus de projets de production, un nouvel album… Bref, je veux le monde ! (Rires). Est-ce que j’en demande trop pour une fille de Buffalo (État de New York) ?

Vous êtes aussi la créatrice de Devise Beauty (2011), une ligne de soins cosmétiques pour les femmes de couleur. Pourriez-vous nous confier quelques- uns de vos secrets de beauté ?

Le plus important, je crois, c’est de boire beaucoup d’eau… Je ne le répéterai jamais assez. Ma grand- mère est créole et elle m’a transmis quelques recettes. Par exemple, c’est d’elle que je tiens cette habitude d’utiliser de l’huile de coco vierge comme base pour à peu près tout. Pour faire court, je conseillerais d’utiliser autant de produits naturels et bio que possible.

Vous venez d’évoquer votre grand-mère… Y a-t-il des femmes dont le parcours, la personnalité vous inspirent ?

Oh oui, tellement ! Surtout dans ma famille. Je pense à mes aïeules ; ce sont elles qui m’ont ouvert la voie et qui ont permis que je me trouve devant vous aujourd’hui. Elles viennent me parler dans mes rêves et m’incitent à profiter des opportunités qu’elles n’ont pas eues. Tout ce que je fais c’est pour qu’elles soient fières de moi. J’ai brisé une malédiction familiale et ça a été très difficile mais désormais je peux aller de l’avant, avec leur soutien.

Vous paraissez plus stable maintenant, moins tourmentée qu’à une époque… Peut-on dire que vous êtes enfin libérée du passé ?

Le passé appartient au passé et il y a bien longtemps que je l’ai laissé derrière moi pour me concentrer sur moi, sur ma carrière et sur ma famille que j’adore. La seule raison pour laquelle je reviens sur tout cela, c’est parce que vos lectrices pourraient bien s’en inspirer. Je l’espère en tout cas. Je suis Jessica White, mannequin, entrepreneure, activiste, philanthrope et, plus important encore, noire et fière de l’être. Je n’ai pas de regrets, et si des barrières se dressent sur ma route, je les fais tomber sans le moindre état d’âme. Tout ce que je veux c’est que les gens s’intéressent à mon avenir plutôt que de s’attarder sur mon passé.

Alors, parlons d’avenir. En 2016, vous étiez la star d’un reality show sur E! intitulé Famously Single – en français « Notoirement célibataire ». Beaucoup de femmes dans la trentaine, comme vous, font des projets de maternité ou de mariage. Pas vous ?

Vraiment ? Est-ce ce dont les femmes rêvent ? Écoutez, moi je fais avec ce que Dieu me donne. Et c’est déjà beaucoup. Avant, le mariage était un vrai sacrement mais je ne suis pas certaine que ça le soit encore aujourd’hui. Oui j’aimerais me marier un jour mais il ne faut rien précipiter. L’amour est un sentiment si puissant ; quand j’aurai trouvé la bonne personne, je le saurai. Je suis avec quelqu’un depuis un peu plus de cinq ans maintenant mais pour l’instant, je ne me sens pas prête à officialiser à ce point notre relation.

Que pourrait-on vous souhaiter de beau pour la suite ?

Il y a bien une chose à laquelle je pense mais je ne voudrais pas me porter malheur en l’exprimant tout haut (Rires). Disons, pour faire simple, que j’aimerais être une meilleure version de moi-même.

Propos recueillis par Béatrice Bébé
Traduction : Françoise Diboussi
Photos : Tatiana Katkova
Créatrice de mode : Honorïne B.
Bijoux : Nacho Jewels
Coiffure : Qlove
Mise en beauté : Mandisa Vonette